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Marianne Stokes, La jeune fille et la mort, 1900. |
Et les tristes discours
Que te met en l’esprit l’amitié paternelle
L’augmenteront toujours !
Le malheur de ta fille au tombeau descendue
Par un commun trépas,
Est-ce quelque dédale où ta raison perdue
Ne se retrouve pas ?
Je sais de quels appas(1) son enfance était pleine,
Et n’ai pas entrepris,
Injurieux ami, de soulager ta peine
Avecque(2) son mépris.
Mais elle était du monde, où les plus belles choses
Ont le pire destin,
Et rose elle a vécu ce que vivent les roses,
L’espace d’un matin.
Puis, quand ainsi serait que, selon ta prière,
Elle aurait obtenu
D’avoir en cheveux blancs terminé sa carrière,
Qu’en fût-il advenu ?
Penses-tu que, plus vieille, en la maison céleste
Elle eût plus d’accueil ?
Ou qu’elle eût moins senti la poussière funeste
Et les vers du cercueil ?
Non, non, mon Du Périer, aussitôt que la Parque (3)
Ôte l’âme du corps,
L’âge s’évanouit au-deçà de la barque (4),
Et ne suit point les morts.
Malherbe, Consolation à M. du Périer, (poème de 84 vers) 1599.
(1) Appas : charmes. (2) Avecque : avec. (3) Parque : les trois Parque avaient pour fonction de filer la vie humaine. Atropos est celle qui est chargée de couper le fil de la vie. (4) La barque : la barque de Charon, le passeur de l’enfer, dans la mythologie grecque.
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